Mais en quoi ceci est-il d'intérêt quant au sort des bélugas?
Nous apprenions récemment que la population de ce mammifère marin de
l'estuaire du Saint-Laurent a chuté de près de 20 % en 10 ans en passant
de 1100 à un peu moins de 900 individus. Cette situation a été décrite comme alarmante
compte tenu que la population de bélugas était déjà plutôt mal en
point. Cette population, qui avait à peine survécu à la chasse effrénée
du 20e siècle, puis qui s'est vue aux proies de contaminants
persistants dans l'environnement (BPC, DDT), semble maintenant crouler sous le poids d'une combinaison de facteurs
(conditions environnementales défavorables, dont la hausse des
températures de l'eau, niveaux élevés de contaminants polybromés (PBDE),
une exposition accrue au bruit et au trafic maritime et un « bloom »
d'algue toxique).
Bien que les facteurs responsables de ce déclin soient toujours sous
la loupe des chercheurs, le véritable problème réside sans doute dans le
fait que les coupures fédérales des dernières années en matière de
recherche scientifique et environnementale n'aideront en rien à résoudre
la problématique, tel que l'affirme Robert Michaud, président du Groupe de recherche et d'éducation sur les mammifères marins (GREMM).
En abolissant des postes de scientifiques travaillant en
écotoxicologie, tout comme le poste d'un chercheur spécialiste des
bélugas, en plus de pratiquement ignorer la question des changements
climatiques, le gouvernement fédéral, bien qu'affirmant le contraire, laisse à son propre sort l'une espèces phares du Saint-Laurent.
Tout comme nous, le béluga est un mammifère au sommet de sa chaîne
alimentaire. Cette position d'apparence reluisante est en fait nuisible
au cétacé blanc puisque ceci contribue au fait que s'y accumulent
plusieurs contaminants, faisant du béluga un des mammifères marins les
plus contaminés du monde. Tout comme nous, le béluga subit les aléas des
conditions climatiques
des dernières décennies. Tout comme nous, le béluga est dépendant d'un
fleuve Saint-Laurent (fleuve, estuaire et golfe) en bonne santé. Si le
lien entre le béluga et nous vous apparaît trop farfelu, parlez-en aux
Premières Nations qui dépendent toujours de sources de nourritures traditionnelles
(lien en anglais) et qui semblent aujourd'hui de plus en plus souffrir
de problèmes en lien avec la contamination de ces sources de nourriture
provenant de l'environnement dans lequel elles évoluent.
Les bélugas font face à la révocation de leur statut d'espèce « menacée
», pour un statut d'espèce « en voie de disparition », mais la portée
des décisions gouvernementales auxquelles nous sommes confrontées est en
quelque sorte encore plus importante. En continuant de fermer les yeux
sur l'apport essentiel de la démarche scientifique et du lien étroit que
celle-ci permet d'établir entre notre santé et celle de notre
environnement, nous risquons de nous diriger tout droit vers un statut
environnemental et humain tout aussi peu reluisant.