(Québec) Le 23 juin, veille de la Fête nationale, un navire de la Garde côtière canadienne repérait, au large de Pointe-au-Père, la carcasse d'un mammifère marin qui flottait à la dérive. Vérification faite, il s'agissait bel et bien de Tryphon, ce grand cachalot qu'on recherchait depuis le 9 juin.La mésaventure de Tryphon a commencé quand il s'est empêtré dans les câbles de casiers pour crabes dans la région de Sept-Îles. Il avait été repéré par des croisiéristes le 9 juin et le lendemain, des pêcheurs avaient réussi à le tirer de sa mauvaise position en le libérant de 13 casiers, mais on s'est alors aperçu que le cachalot avait toujours un câble enroulé autour de la tête et autour de son aileron dorsal. Mais il semblait quand même en bonne forme.
Le 15 juin, soit cinq jours après sa libération, Tryphon était observé à 400 km plus à l'ouest, dans la région des Bergeronnes, toujours empêtré dans ses cordages.
Le 16 juin, l'équipe dépêchée sur les lieux n'a pu retrouver la trace du mammifère et tout le monde qui navigue dans le secteur avait été informé de bien surveiller la mer afin de le repérer et d'enfin pouvoir le libérer.
Finalement, le 23 juin, la garde côtière qui naviguait du côté sud du Saint-Laurent a repéré la carcasse. Ce sont les gens de l'Institut Maurice-Lamontagne qui ont confirmé que c'était Tryphon. L'identification a été rendue possible grâce aux numéros de bouées accrochées aux cordages qu'il traînait depuis plusieurs jours.
L'histoire est triste, très triste, d'autant que Tryphon était un cachalot connu dans cette partie du fleuve. Sa première apparition a été signalée en 1991 et il était fidèle à tout le secteur qui va de Tadoussac à Baie-Comeau, en passant par les Bergeronnes.
D'ailleurs, depuis l'annonce de sa mort, plein de gens communiquent avec le Réseau québécois d'urgence pour les mammifères marins et le Groupe de recherche et d'éducation sur les mammifères marins (GREMM) pour se désoler de sa disparition et pour raconter des histoires qui le concernent, me racontait au téléphone samedi dernier Véronik de la Chenelière, porte-parole de l'organisme.
Le cachalot est un animal rare dans le Saint-Laurent. Depuis qu'on s'y intéresse, on n'en a recensé qu'une trentaine d'individus. C'est un mammifère impressionnant qui mesure près de 15 mètres et pèse entre 20 et 40 tonnes. Selon une publication de Chantal St-Hilaire, guide-biologiste, c'est la plus grosse baleine à dents qui existe.
Le souffle de cette immense baleine fait jusqu'à trois mètres de hauteur et est très bruyant. On peut l'entendre jusqu'à un kilomètre de distance.
Le cachalot peut vivre jusqu'à 60 ans.
La carcasseLa carcasse de Tryphon n'a pas été récupérée, même si son repêchage pourrait servir énormément à l'éducation et à la recherche. On pourrait également reconstituer son squelette et l'exposer dans un musée.
Quand un mammifère comme Tryphon flotte à la dérive, c'est très compliqué de le récupérer et c'est une intervention qui coûte très cher.
Il est cependant possible que dans les prochains jours, la carcasse s'échoue sur le rivage et là, on en profitera pour la récupérer.
La semaine prochaine, je vous reviendrai avec plus de précisions sur l'histoire de Tryphon et celle de ses amis cachalots dans le Saint-Laurent.
J'ai fait un petit bout d'entrevue téléphonique avec le biologiste Robert Michaud, un des fondateurs du GREMM et il m'a raconté des choses passionnantes qui méritent que je m'y attarde dans une autre chronique.
Les carpesIl y a deux semaines, je vous parlais des carpes de la rivière Boyer dans Bellechasse qui servaient de pâture aux pygargues à tête blanche, aux goélands et aux corneilles. Un lecteur, Gilles Faguy, m'a fait parvenir quelques précisions qui méritent d'être publiées : «Je voudrais vous parler des carpes allemandes dont j'ai eu le plaisir d'observer le rituel des ébats amoureux dans la baie de Saint-Antoine-de-Tilly pendant plusieurs années.
Malheureusement, une maladie inconnue ou une mauvaise qualité des eaux les a presque toutes tuées, il y a quelques années, dans ce coin de pays. Nous n'avons jamais su pourquoi.
«Ce rituel atteint son apogée vers le 10 juin et dure plus d'une semaine, jour et nuit.
À première vue, on pourrait penser que ces carpes se débattent dans l'eau peu profonde pour s'en déprendre, ou pour remonter la rivière, mais tel n'est pas le cas.
«La femelle, en solitaire, deux fois plus grosse que le mâle, se dirige le plus près possible du rivage, ou d'un haut-fond, et y pond ses oeufs. Les mâles, toujours à l'affût, se collent à la femelle et y déversent leur semence dans un clapotis et un bouillonnement des eaux qui deviennent blanchâtres, couleur de la semence des mâles qui peuvent être une dizaine à s'exciter en frôlant la femelle.
«C'est, je crois, ce que montre la photo de votre article du 20 juin.
Les carpes femelles peuvent mesurer plus de 60 cm et peser près de 20 livres, preuve à l'appui. Le mâle est beaucoup plus petit.»