Mylène Paquette vient de réaliser un rêve complètement fou. La jeune femme de 30 ans est devenue, hier soir, la première Québécoise à traverser l'Atlantique... à la rame.
Partie du Maroc le 12 janvier, la Montréalaise apercevait enfin la Barbade, en début de soirée, lorsque le Journal l'a jointe à bord du monocoque Sara G où elle avait parcouru près de 5000 kilomètres en 57 jours. Cinq Européens, tous des hommes, l'ont accompagnée dans cette aventure.
«Ça va être difficile de me séparer d'eux. Je les considère comme mes frères», a indiqué Mylène Paquette, une préposée aux bénéficiaires de l'hôpital Sainte-Justine.
Durant le périple, elle souhaitait d'ailleurs amasser 8000 $ pour la cause des enfants malades, sa «source de motivation». Hier, elle était sur le point d'atteindre son objectif.
Un bon steakDepuis leur départ du continent africain, les six membres d'équipage ont ramé jour et nuit, par groupe de trois, à raison de deux heures chaque fois.
Les derniers moments de la traversée ont été «les plus difficiles» pour Mylène, qui éprouvait beaucoup de douleur au genou droit.
«Mais je ne pouvais pas abandonner comme ça, dit-elle. J'ai donné tout ce que j'ai pu.»
Des proches de la jeune femme l'attendaient sur la terre ferme, où elle avait hâte de les serrer dans ses bras. Il était environ 22h lorsqu'elle les a finalement retrouvés, a confirmé au Journal sa soeur, Évelyne.
«Je vais devoir m'excuser auprès d'eux, parce qu'ils ont été tellement inquiets», confie Mylène.
Obligée de manger des ration packs de l'armée britannique depuis près de deux mois, la jeune femme a avoué qu'elle rêvait aussi de croquer dans «un bon steak saignant. » Elle restera à la Barbade jusqu'au 23 mars, où elle pourra -- enfin -- récupérer le sommeil qui lui a cruellement manqué.
«On y a goûté»L'équipage du Sara G n'a affronté aucune véritable tempête durant la traversée, mais a tout de même vécu son lot d'embûches.
Vers la 17e journée, Mylène Paquette s'est mise en colère lorsqu'elle a été éjectée de son siège, après qu'une grosse vague eut heurté l'embarcation. «J'étais frustrée, dit-elle, et j'ai jeté les rames violemment, au point où l'une d'elles s'est détachée. »
«Il a fallu arrêter toute une nuit pour régler le problème, soupire- t-elle. Tout le reste de la traversée, on a dû ramer avec des rames de rechange. Heureusement, personne ne m'en a voulu.»
La semaine suivante, des vents intenses et des vagues de «30 à 35 pieds» ont freiné l'équipage qui a dû utiliser une «ancre flottante» durant six jours pour éviter d'être repoussé vers les côtes africaines. «On y a goûté», lance Mylène Paquette.
Les nuits n'étaient pas vraiment reposantes, avoue la jeune femme, qui s'est endormie à quelques reprises en ramant. «Le plus difficile, c'était de se réveiller toutes les deux heures», dit-elle.
Mais la rameuse a aussi vécu des moments uniques, qui la marqueront toute sa vie. Elle a aperçu un requin, une baleine, des dauphins et beaucoup de poissons volants, en plus de nager dans l'océan à une douzaine de reprises.
Dès son retour à Montréal, Mylène s'attaquera à un autre défi: traverser l'Atlantique... en solitaire cette fois.
Un bateau pas ordinaire * 11,1 m de long et 1,8 m de large
* 1750 kg une fois chargé
* 3 sièges pour les rameurs et 3 espaces de repos.
* 6 couchettes sont disponibles.
* Le bateau est recouvert d'une couche supplémentaire de fibre de verre.
* Grâce à un système de ballasts, le vaisseau est auto-redressable en cas de chavirage.
* L'électricité à bord est fournie par 6 panneaux solaires pouvant charger 2 batteries de 40 ampères.