Le printemps arrive à grand pas malgré la glace, pluie et re-glace des derniers mois …

Pour celles et ceux qui profiteront des crues pour naviguer là où on n’a pas normalement accès, rappelons-nous la prudence à exercer dans le courant.  Sans aller jusqu’aux rouleaux à rappel et autres situations extrêmes de rivière, naviguer sur le Fleuve autour de Montréal comporte des risques à connaître pour que notre passion demeure sécuritaire.

Les cravates («broach»), crépines («strainers») et coincements sont familiers aux canotiers et kayakistes de rivière, mais moins à nous, et pourtant avec sa longueur, sa surface plus grande et sa moindre maniabilité fine un kayak de mer est bien plus susceptible à la cravate qu’un kayak de rivière …

Cravate:

C’est quoi une cravate («broach»)?  c’est quand notre kayak se retrouve entre le courant et un objet fixe.  La vidéo du lien ci-dessous explique comment en sortir en situation idéale:

https://www.youtube.com/watch?v=a4zSYL5BECY

… idéale parce que quand l’objet est une bouée au bout d’une chaîne, qui bouge sans contrôle et n’offre aucune prise de main, c’est pas aussi évident.  Le principe demeure cependant d’éviter de montrer le pont de notre kayak au courant, car même un courant d’à peine 1 nœud pourrait suffire à écraser le kayak autour de l’objet, écrasant le pont sur nos cuisses et pieds, nous empêchant de sortir même avec un grand cockpit.

A Montréal sur le Fleuve il y a eu 2 incidents (noyades) plutôt récents impliquant un coincement/cravate de kayak de mer sur une bouée (en 2016 durant le circuit Charles-Bruneau et en 2010 au quai de l’Horloge).

· L’idéal est de garder une bonne distance entre notre kayak et une bouée, un arbre, un pilier de pont, un quai, etc. quand on descend le courant (même s’il est très faible).

Si on se retrouve en situation de cravate :

· Il faut giter vers l’aval pour éviter que l’eau monte sur le pont du kayak, ensuite tenter d’évacuer perpendiculairement au courant comme sur la vidéo;

· Si on ne peut pas évacuer, il faut sortir du kayak rapidement s’il se retrouve le pont face au courant (par exemple si on gite par erreur vers l’amont ou si le courant fait rouler le kayak dans cette position, ce qui arrive souvent); en général la cravate n’est pas instantanée; mais faut pas attendre que l’écrasement se produise pour sortir (les secondes comptent). 

Crépine

On doit éviter de se faire coincer par un arbre, une clôture, une grille, etc. qui agira comme une crépine («strainer»), nous coinçant comme une cravate mais sans la déformation du kayak.  Le danger vient du fait que si le courant est assez fort il peut nous empêcher de sortir (pression sur le dos, pris dans les branches) ou nous renverser et nous coincer la tête sous l’eau.

La vidéo que j’ai trouvée est un peu extrême (fort courant), mais ça peut aussi très mal tourner à seulement 1 nœud dans une clôture ou un arbre submergé :

https://www.youtube.com/watch?v=DvzumGifKPA

Un autre danger présent sur le fleuve est de se faire entraîner sous un objet fixe : glace, embâcle, quai, etc.  En naviguant ou en mettant à l’eau, on doit se demander où le courant nous amènera en cas de fausse manœuvre.  Avec au-delà de 90% de notre corps submergé, on offre une grande surface au courant et il est difficile de ne pas se faire entrainer même avec un courant aussi faible que ½-nœud.

Si on marche sur la glace on doit se demander où on ressortira si la glace cède.  Au courant et à la surface submergée de notre corps s’ajoutent les bottes, le dry qui augmente la surface, les mitaines et les mains un peu gelées = impossible de résister au courant, encore moins de sortir sans de l'aide immédiate et efficace.

J’avoue avoir eu des frissons en visionnant la vidéo de promotion d’un fournisseur de kayak dans laquelle on voit un groupe de kayakiste marcher sur la glace puis mettre à l’eau (là où la glace se termine) à un endroit où le courant se dirige clairement sous la glace.

En pagayant face à Bellerive au printemps j’ai aussi été surpris par le courant déviant assez soudainement vers les Iles de Boucherville (à l’embouchure du «Canal du Courant», justement).

Les autres objets, ceux-là présents à l’année, sont les quais et autres infrastructures et les navires.  On ne peut pas toujours savoir si un quai comporte une cavité submergée, ou si c’est une structure flottante.  Les navires sont un autre exemple : lorsque chargé, la coque submergée du navire agit comme un mur qui nous fera dévier, mais si le navire est lège ou si c’est une barge, le fond n’est pas loin de la surface.

Selon ma compréhension des dernières nouvelles au sujet de l’incident Michel Lajoie cet hiver (JdeM 13 janvier), Michel aurait été malencontreusement dévié puis appuyé contre la coque d’un navire, puis emporté en-dessous du navire (je n’ai pas pu vérifier cette information cependant).

Coincement

Cette situation est plus évidente/intuitive.  Si on doit nager dans le courant en eau peu profonde (moins de 1,5 m) toujours le faire les pieds devant pour ne pas se coincer un pied sous un objet.

J’ai trouvé quelques images sur le site suivant :

http://www.performancevideo.com/swim_whitewater

Quelques photos datant de 2014 que j’ai retrouvées :

1. L’entrée du Chenal du Courant (en face de Bellerive) : le courant du fleuve, typiquement de 1½-2 nœuds vers le nord-ouest, dévie franc nord juste devant cette embâcle (je ne voudrais pas me retrouver en-dessous …)

2. La coque d’un porte-conteneur (kayak en aval ...)

3. Juste un moment de pur bonheur à naviguer entre les morceaux de sucre d’orge, température ambiante de 3°C, soleil, mer d’huile, courant de ±1½-nœud, pas d’objet fixe en vue …